CA et DE, quels niveaux de qualification ?

03/11/2019 à 7h00
Mise à jour le 03/11/2019 à 19h00

1. Comprendre le nouveau cadre national des certifications professionnelles

Instauré par la loi Avenir professionnel du 5 septembre 2018 pour servir son ambition de “construire une société de compétences”, le cadre national des certifications professionnelles1 est la nouvelle nomenclature à laquelle l’ensemble des ministères et organismes certificateurs devront désormais se référer pour déterminer le niveau de qualification des certifications professionnelles enregistrées au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP). Elle sera effective à compter du 1er janvier 2020.

L’article L. 6113-1 du code du travail indique que « Les certifications professionnelles enregistrées au répertoire national des certifications professionnelles permettent une validation des compétences et des connaissances acquises nécessaires à l’exercice d’activités professionnelles. Elles sont définies notamment par un référentiel d’activités qui décrit les situations de travail et les activités exercées, les métiers ou emplois visés, un référentiel de compétences qui identifie les connaissances et les compétences, y compris transversales, qui en découlent et un référentiel d’évaluation qui définit les critères et les modalités d’évaluation des acquis ». Par ailleurs, ce même article précise que « les certifications professionnelles sont constituées de blocs de compétences, ensembles homogènes et cohérents de compétences contribuant à l’exercice autonome d’une activité professionnelle et pouvant être évaluées et validées ».

Outre le fait de donner un fondement réglementaire et une meilleure lisibilité aux différents niveaux de qualification, cette réforme vise avant tout à mettre la nomenclature française en conformité avec celle définie par le cadre européen des certifications pour permettre les comparaisons entre les deux systèmes et favoriser les correspondances avec les certifications d’autres pays européens.

Contrairement à la nomenclature approuvée en 1969 par le groupe permanent de la formation professionnelle et de la promotion sociale qui ne se référait qu’aux diplômes de l’Éducation nationale, le nouveau cadre national définit les niveaux de qualification selon une logique de savoirs et de compétences acquis en les répartissant sur une échelle qui comprend huit niveaux, à l’instar du cadre européen des certifications.

Le niveau de gradation des compétences et les descripteurs associés à chacun des niveaux de qualification sont précisés dans la grille annexée au décret du 8 janvier 2019 fixant les critères associés aux niveaux de qualification du cadre national des certifications professionnelles.

Cette grille définit, pour chaque niveau de qualification, trois types de descripteurs :

  • La complexité des savoirs associés à l’exercice de l’activité professionnelle visée ;
  • Le niveau des savoir-faire, qui s’apprécient notamment en fonction de la complexité et de la technicité d’une tâche ou d’une activité dans un processus de travail ;
  • Le degré de responsabilité et d’autonomie au sein de l’organisation de travail.

Ainsi le niveau 4 « atteste la capacité à effectuer des activités nécessitant de mobiliser un éventail large d’aptitudes, d’adapter des solutions existantes pour résoudre des problèmes précis, à organiser son travail de manière autonome dans des contextes généralement prévisibles mais susceptibles de changer, ainsi qu’à participer à l’évaluation des activités. Le diplôme national du baccalauréat est classé à ce niveau du cadre national » ;

Le niveau 5 « atteste la capacité à maitriser des savoir-faire dans un champ d’activité, à élaborer des solutions à des problèmes nouveaux, à analyser et interpréter des informations, en mobilisant des concepts, à transmettre le savoir-faire et des méthodes » ;

Le niveau 6 « atteste la capacité à analyser et résoudre des problèmes complexes imprévus dans un domaine spécifique, à formaliser des savoir-faire et des méthodes et à les capitaliser. Les diplômes conférant le grade de licence sont classés à ce niveau du cadre national » ;

Le niveau 7 « atteste la capacité à élaborer et mettre en œuvre des stratégies alternatives pour le développement de l’activité professionnelle dans des contextes professionnels complexes, ainsi qu’à évaluer les risques et les conséquences de son activité. Les diplômes conférant le grade de master sont classés à ce niveau du cadre national » ;

Le niveau 8 « atteste la capacité à identifier et à résoudre des problèmes complexes et nouveaux impliquant une pluralité de domaines, en mobilisant les connaissances et les savoir-faire les plus avancés, à concevoir et à piloter des projets et des processus de recherche et d’innovation. Le diplôme national de doctorat est classé à ce niveau du cadre national ».

2. Quelle correspondance avec la nomenclature de 1969 2 ?

Répertoire national des certifications professionnelles Nomenclature de 1969 Cadre national des certifications professionnelles
Nomenclature de 2020
Équivalence/diplômes
Niveau 1 Savoirs de base
Niveau 2 Capacité à effectuer des activités simples et résoudre des problèmes courants
Niveau V Niveau 3 CAP
Niveau IV Niveau 4 Bac
Niveau III Niveau 5 Bac +2
Niveau II Niveau 6 Licence
Niveau I Niveau 7 Master
Niveau 8 Doctorat

3. Incidences sur les diplômes délivrés par le ministère de la Culture

Un arrêté récent du ministre de la Culture3 vient mettre en cohérence avec ces nouveaux niveaux de certifications professionnelles les diplômes nationaux supérieurs professionnels, diplômes d’État (DE), certificats d’aptitude (CA) et Diplôme national supérieur professionnel (DNSP) dans les domaines des arts et de la culture. Rappelons ici que ce texte ne modifie en rien l’architecture générale qui prévalait jusqu’alors, dans le cadre de l’ancienne nomenclature (I à V).

DE musique :
Il est classé au niveau 6 du cadre national des certifications professionnelles,4.

DE danse :
Il est classé au niveau 5 du cadre national des certifications professionnelles5.

DE Théâtre :
Il est classé au niveau 5 du cadre national des certifications professionnelles6.

DUMI (Diplôme universitaire de musicien intervenant) :
Pas de modification à ce jour de l’arrêté du 28 juillet 2017 portant enregistrement au Répertoire national des certifications professionnelles et où le DUMI est un diplôme d’enseignement supérieur enregistré au niveau II du RNCP (fin de premier cycle d’études supérieures, soit Bac+3)7.

Musicien interprète des musiques actuelles (FNIIJMA)8 :
Il est classé au niveau 4 du cadre national des certifications professionnelles.

Musicien des musiques actuelles (CFPM)9:
Il est classé au niveau 4 du cadre national des certifications professionnelles.

Musicien des musiques actuelles (Association Trempolino)10:
Il est classé au niveau 5 du cadre national des certifications professionnelles.

CA musique :
Il est classé au niveau 7 du cadre national des certifications professionnelles11.

CA danse :
Il est classé au niveau 7 du cadre national des certifications professionnelles12.

CA théâtre :
Il est classé au niveau 7 du cadre national des certifications professionnelles13.

CA directeur d’établissement d’enseignement artistique :
Il est classé au niveau 7 du cadre national des certifications14.

DNSP Musicien :
Il est classé au niveau 6 du cadre national des certifications professionnelles15.

DNSP danseur :
Il est classé au niveau 6 du cadre national des certifications professionnelles16.

DNSP comédien :
Il est classé au niveau 6 du cadre national des certifications professionnelles17.

4. Une incidence sur le niveau de …rémunération ?

Bien qu’allant dans le sens d’une meilleure reconnaissance du niveau de formation des enseignants, cette réévaluation qui pourra par ailleurs favoriser la mobilité notamment sur le plan européen, concerne uniquement les diplômes.

Il ne saurait y avoir, à ce stade, de corrélation effective avec les grilles indiciaires propres à chaque cadre d’emplois de la filière culturelle de la fonction publique territoriale (enseignement artistique) ! Mais les revalorisations des trois CA (danse, musique et théâtre), du DE musique et du DUMI qui ont eu lieu en 2015 et 2017 ne pourraient-elles être de nature à encourager “la profession” à œuvrer pour une revalorisation des cadres d’emplois correspondants ?

C’est ce qu’ont obtenu les travailleurs sociaux, suite à la réforme des cinq diplômes du travail social18 et à l’approbation des nouveaux référentiels en commission professionnelle consultative (CPC). Près de 67 000 agents de la filière socio-éducative, dans les trois versants de la fonction publique, ont été reclassés en catégorie A au 1er février 201919. L’architecture des grilles elle-même change puisque tous les corps en catégorie A sont désormais structurés en deux grades (au lieu d’un), y compris les 7 000 personnels d’encadrement – cadres, conseillers ou conseillers techniques socio-éducatifs – déjà en catégorie A, qui voient leurs carrières revalorisées dans les mêmes proportions, avec l’instauration d’un grade d’avancement supplémentaire. Certes, les rémunérations des travailleurs sociaux (hors fonctions d’encadrement) restent, pour l’heure, limitées au “petit A” et non au “A type” de la fonction publique, mais cette revalorisation est l’expression de la volonté de reconnaissance de leur diplôme au niveau licence tout comme du niveau élevé des missions exercées.

En 2014, on dénombrait 18 600 agents publics (fonctionnaires et contractuels) sur le cadre d’emplois des ATEA20.
Alors, …chiche ?

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  1. Selon France compétences, “une certification professionnelle vise la validation de compétences professionnelles au sens du Code du travail”.
  2. Voir l’article 2 du décret n° 2019-14 du 8 janvier 2019.
  3. Arrêté du 26 septembre 2019 pris en application du décret n° 2019-14 du 8 janvier 2019 relatif au cadre national des certifications professionnelles.
  4. Arrêté du 5 mai 2011 relatif au diplôme d’État de professeur de musique et fixant les conditions d’habilitation des établissements d’enseignement supérieur à délivrer ce diplôme, article 1.
  5. Arrêté du 23 juillet 2019 relatif aux différentes voies d’accès à la profession de professeur de danse en application de l’article L. 362-1 du code de l’éducation, article 1.
  6. Arrêté du 23 octobre 2015 relatif au diplôme d’État de professeur de théâtre et fixant les conditions d’habilitation des établissements d’enseignement supérieur à délivrer ce diplôme, article 1.
  7. Attention ! ce diplôme de musicien intervenant reste bien un diplôme universitaire (DU) et ne devient donc pas une licence à proprement parler. Cependant, la poursuite d’études en Master pour les titulaires du DUMI n’ayant pas de licence sera facilitée au travers d’une entrée par validation d’acquis. En effet, cette validation, difficilement accordée à niveau Bac+2, devrait être plus facilement accessible à niveau Bac+3.
  8. Demande déposée par la Fneijma ; Arrêté du 6 février 2008 portant enregistrement au répertoire national des certifications professionnelles. Enregistrement pour cinq ans, avec effet au 21 février 2008 jusqu’au 21 février 2013.
  9. Demande déposée par le Centre de formation professionnelle de la musique ; Arrêté du 31 janvier 2018 portant enregistrement au répertoire national des certifications professionnelles. Enregistrement pour trois ans, au niveau IV, sous l’intitulé “Musicien indépendant des musiques actuelles” avec effet au 30 juin 2013, jusqu’au 8 février 2021.
  10. Demande déposée par l’Association Trempolino ; Arrêté du 07 avril 2017 publié au Journal Officiel du 21 avril 2017 portant enregistrement au répertoire national des certifications professionnelles. Enregistrement pour quatre ans, au niveau III, sous l’intitulé “Musicien des musiques actuelles” avec effet au 06 décembre 2013, jusqu’au 21 avril 2021..
  11. Arrêté du 29 juillet 2016 relatif au certificat d’aptitude aux fonctions de professeur de musique et fixant les conditions d’habilitation des établissements d’enseignement supérieur à délivrer ce diplôme, article 1.
  12. Arrêté du 6 janvier 2017 relatif au certificat d’aptitude aux fonctions de professeur de danse et fixant les conditions d’habilitation des établissements d’enseignement supérieur à délivrer ce diplôme, article 1.
  13. Arrêté du 5 septembre 2019 relatif au certificat d’aptitude aux fonctions de professeur d’art dramatique, article 1.
  14. Arrêté du 5 septembre 2019 relatif au certificat d’aptitude aux fonctions de directeur d’établissement d’enseignement artistique, article 1.
  15. Arrêté du 1er février 2008 relatif au diplôme national supérieur professionnel de musicien et fixant les conditions d’habilitation des établissements d’enseignement supérieur à délivrer ce diplôme, article 1.
  16. Arrêté du 23 décembre 2008 relatif au diplôme national supérieur professionnel de danseur et fixant les conditions d’habilitation des établissements d’enseignement supérieur à délivrer ce diplôme, article 1.
  17. Arrêté du 1er février 2008 relatif au diplôme national supérieur professionnel de comédien et fixant les conditions d’habilitation des établissements d’enseignement supérieur à délivrer ce diplôme, article 1.
  18. Diplôme d’État d’assistant de service social (DEASS), diplôme d’État d’éducateur spécialisé (DEES), diplôme d’État d’édu­cateur technique spécialisé (DEETS), diplôme d’État d’éducateur de jeunes enfants (DEEJE) et diplôme d’État de conseiller en économie sociale et familiale (DECESF).
  19. Ce passage concerne plusieurs métiers.
    – dans la FPE : les assistants de service social, les conseillers techniques de service social, les éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) et les conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation (CPIP).
    – dans la FPT : les assistants socio-éducatifs (ASE) (assistants de service social, éducateurs spécialisés, conseillers en économie sociale familiale) et éducateurs de jeunes enfants (EJE).
    – dans la FPH : les assistants socio-éducatifs (assistants de service social et éducateurs spécialisés), les conseillers en économie sociale familiale, les éducateurs techniques spécialisés et les éducateurs de jeunes enfants.
  20. Observatoire des métiers, de l’emploi et des compétences de la FPT.

4 Comments

  • A mon sens, il y a quand même des incohérences…
    Le DE Musique pas au même niveau que la Danse et le Théâtre par contre pour le CA les trois spécialités reconnues de la même façon, bon…
    Et pour finir, le CA de Direction qui demande des compétences transversales diverses et variées comme on le sait et comme on le vit au quotidien, pas de reconnaissance supérieure !!
    Chers législateurs, je ne comprendrais jamais vos démarches…

    Lacognata
    Posted 3 novembre 2019 at 9h59
  • Qu’en est-il avec les diplômes étrangers ? Le traité de Bologne? J’ai un master didactique et donc reconnu niveau 7…

    Dupont
    Posted 3 novembre 2019 at 12h53
  • Qu’en est-il des master délivrés par les cnsm car considérés niveau II dans l’ancienne grille ils étaient mieux reconnus que le DE par exemple ?

    Luc Rosier
    Posted 3 novembre 2019 at 13h50
  • Merci de ces informations. Mais à quel niveau placer les professeurs ayant obtenus leur PEA par concours ou examen professionnel ?

    Causin Françoise
    Posted 3 novembre 2019 at 14h23

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